
Route du Modernisme de Barcelone
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La route d’1 jour
Pour ceux qui disposent d’une seule journée, le guide propose la Route d’un jour, qui évite toutes les déviations. On peut la faire en une seule journée et elle permet de faire, en plus, une visite d’un monument ouvert au public. Pendant les mois d’hiver, afin de profiter de la lumière du jour, nous recommandons de commencer par l’itinéraire puis de revenir au monument choisi pour en visiter l’intérieur. La Route d’un jour est signalée sur les cartes par une ligne verte, et elle suit les axes principaux du Modernisme barcelonais : la Rambla, le passeig de Gràcia, l’avinguda Diagonal et l’avinguda Gaudí.
Arc de Triomf et Casa Estapé – Casa Doctor Genové
Un bon endroit pour commencer cette Route du Modernisme est l’ARC DE TRIOMF (ARC DE TRIOMPHE. Passeig de Lluís Companys, s/n), construit sur une conception de Josep Vilaseca, tout en haut du passeig de Lluís Companys, qui présidait l’entrée à l’enceinte de l’Exposition universelle de 1888.C’est de là que commence la Route d’un jour, conçu spécialement pour ceux qui ne disposent que d’une seule journée pour visiter le Modernisme de la ville. Bien qu’il ne comprenne pas la totalité des œuvres les plus recommandées, il offre cependant une vision globale de cette architecture, et il représente une bonne manière de découvrir Barcelone. L’itinéraire d’un jour est indiqué dans le texte de ce guide par le symbole . .
Avant de poursuivre en descendant vers le parc de la Ciutadella, nous prendrons le passeig de Sant Joan jusqu’à la CASA ESTAPÉ (MAISON ESTAPÉ. Passeig de Sant Joan, 6), de Bernardí Martorell i Rius (1907), reconnaissable par sa curieuse coupole, œuvre de Jaume Bernades. Aussi à proximité immédiate de l’Arc de Triomf, dans la courte avinguda de Vilanova, se trouve l’édifice de
l’HIDROELÈCTRICA (COMPAGNIE HYDROÉLECTRIQUE. Avinguda de Vilanova, 12), construction modernista de l’ancienne centrale catalane d’électricité édifiée par Pere Falqués i Urpí entre 1896 et 1899, à laquelle on peut accéder certains jours aux heures de bureau.
Nous poursuivons par le passeig de Lluís Companys, jusqu’au PARC DE LA CIUTADELLA (PARC DE LA CIUTADELLA. Passeig de Pujades, s/n, passeig de Picasso, s/n). C’est dans ce lieu que l’on peut considérer que le mouvement modernista a eu sa première grande expression architecturale. Comme son nom l’indique, l’espace avait été occupé par une citadelle militaire, construite au début du XVIIIe siècle après la défaite de Barcelone au cours de la guerre de Succession (1714). La ville a été durement punie après sa chute qui a suivi un long siège, et la citadelle (avec les nouvelles murailles et le château de Montjuïc) a été le grand instrument permettant à la nouvelle dynastie bourbonienne de contrôler militairement la ville pendant plus de cent cinquante ans. Au milieu du XIXe siècle, après des années de pétitions des habitants, le gouvernement de Madrid a fini par accepter que les murailles et la citadelle soient détruites pour permettre la croissance urbanistique de la ville. C’est ce qui a permis la création de l’Eixample et du nouveau parc de la Ciutadella.
Avant le parc, cependant, les terrains avaient accueilli l’Exposition universelle de 1888. Bien que celle-ci ait certainement été moins importante que d’autres expositions similaires comme celle de Paris ou celle de Londres, l’Exposition universelle de Barcelone voulait faire connaître les merveilles des nouvelles technologies de l’industrie capitaliste naissante, et permettre ainsi à la ville d’être reconnue dans le monde entier.
Malgré tout, la construction des pavillons et des infrastructures a été réalisée en peu de temps et avec un degré d’improvisation élevé. Il a fallu pour ce faire l’association d’architectes consolidés, tels que Josep Fontserè, avec de jeunes diplômés, comme Lluís Domènech i Montaner, qui a eu ainsi l’occasion de montrer ses dons impressionnants de direction et de coordination -tout spécialement dans le Gran Hotel Internacional, aujourd’hui disparu, qui pouvait loger cinq cents hôtes et que l’équipe de Domènech a construit en moins de soixante jours. Il existe aussi de nombreux mythes et rumeurs quant au rôle qu’aurait joué Antoni Gaudí dans la construction du parc de la Ciutadella. Certains assurent qu’il a collaboré avec Josep Fontserè pour faire la cascade et, peut-être aussi, le réservoir du carrer de Wellington. D’autres pensent voir la main de Gaudí dans la grille de la porte principale du parc ainsi que dans le pavillon, aujourd’hui disparu, de la Companyia Transatlàntica.
Bien que le parc ne soit pas considéré comme un jardin modernista en tant que tel, on y trouve cependant de remarquables œuvres de ce style. À côté même d’une porte latérale du parc, dans le passeig de Pujades, nous trouverons le bâtiment qui était destiné à être le café-restaurant de l’Exposition universelle de 1888. L’édifice a été construit entre 1887 et 1888 par Lluís Domènech i Montaner en brique apparente, technique peu habituelle à l’époque, et il constitue l’un des premiers exemples du Modernisme barcelonais. Ses créneaux, sa frise d’écus et sa sobriété lui donnent un certain air médiéval dans lequel ressort l’éclectique amalgame d’arcs catalans, de grandes fenêtres romaines et d’arcs rappelant l’architecture arabe. L’édifice, connu aussi sous le nom de CASTELL DELS TRES DRAGONS (Château des trois dragons), abrite des installations du Musée des Sciences naturelles, fermées au public. L’édifice a été restauré récemment en respectant les valeurs architecturales de sa construction ainsi que son mobilier. Dans les alentours immédiats, on trouvera ensuite deux délicieux bâtiments,
l’HIVERNACLE (SERRE. Passeig de Picasso, s/n. Parc de la Ciutadella), œuvre de Josep Amargós i Samaranch, construite entre 1883 et 1887, qui accueille actuellement tous les types d’événements sociaux, et
l’UMBRACLE (SERRE D’ÉTÉ. Passeig de Picasso, s/n. Parc de la Ciutadella), construite par Josep Fontserè i Mestres en 1883-1884. Cela vaut la peine d’y entrer un instant pour admirer les splendides plantes qu’ils protègent.
Depuis le parc de la Ciutadella, nous pourrons nous enfoncer dans le vieux quartier de la ville par les carrers de la Fusina ou de la Ribera, qui nous mèneront à l’ancien
(MARCHÉ DEL BORN. Plaça Comercial, 12) qui était, jusque dans les années soixante-dix du XXe siècle, le marché central de la ville. Cette structure à base de fer, de bois et de verre, œuvre que Josep Fontserè construisit en 1876, est un excellent exemple des précédents architecturaux du Modernisme, tout spécialement en ce qui concerne la conception de structures innovantes que les nouveaux matériaux industriels rendaient possible, et l’importance que l’on donnait à l’utilisation de la lumière naturelle. Dans l’enceinte, on peut aujourd’hui voir les ruines découvertes en 2001, qui font partie des constructions de l’ancienne Barcelone détruites en 1715 pour faire place à la citadelle militaire. Ces vestiges peuvent être visités et ils font partie du Musée d’Histoire de la Ville de Barcelone (Pour davantage d’information, appeler le 933 190 222).On prendra, juste devant le marché, le passeig del Born, peut-être la seule rue de Barcelone qui conserve encore de nos jours les pavés caractéristiques de la première moitié du XXe siècle. Pendant tout ce tronçon de l’itinéraire, il vaut la peine, en passant, de faire attention aux rues du quartier de la Ribera, dont certaines s’ouvrent sous des voûtes comme au Moyen Âge, ainsi qu’à leurs noms, dans de nombreux cas en rapport avec les anciens métiers qui étaient regroupés dans ces rues. C’est aussi dans ce quartier que l’on rencontrera certains des bâtiments les plus anciens de la ville, la majorité d’entre eux étant bien restaurés. Le passeig del Born nous mènera à la BASÍLICA DE SANTA MARIA DEL MAR (BASILIQUE DE SANTA MARIA DEL MAR. Plaça de Santa Maria, s/n), du XIVe siècle, qui est l’un des temples les plus significatifs du gothique catalan. En suivant l’édifice par le carrer de Santa Maria, on longera le FOSSAR DE LES MORERES (FOSSÉ DES MÛRIERS. Plaça del Fossar de les Moreres, s/n), l’un des principaux symboles du catalanisme, puisque, selon la tradition, c’est là que sont enterrés les cadavres de ceux qui ont défendu Barcelone lors du siège de 1714. Le mémorial installé par la municipalité en 2001 rappelle cette défense héroïque de la ville par les milices civiles catalanes, qui ont résisté durant plus d’un an à l’alliance des armées espagnole et française, bien supérieures en nombre et en ressources.
De l’autre côté de la basilique, on prendra puis on suivra le carrer de l’Argenteria, et l’on traversera la Via Laietana en direction du carrer de Jaume I, qui nous mènera au cœur de la ville. Après avoir traversé la plaça de Sant Jaume (centre politique et administratif de la ville depuis le Moyen Âge), nous poursuivrons notre route par le carrer de Ferran. Juste après la place, on pourra tourner à gauche dans le carrer del Pas de l’Ensenyança afin de rendre visite au bar à cocktails El Paraigua décoré avec des éléments modernistes originaux récupérés dans d’autres commerces (Pour davantage d’information, voir On sort, guide des bars et restaurants modernistes). Par le carrer de Ferran, on parvient jusqu’à un pub irlandais, le MOLLY’S FAIR CITY (C/ Ferran, 7-9), qui était autrefois une boutique et qui garde une bonne partie de sa décoration modernista originale de la fin du XIXe tant à l’extérieur comme à l’intérieur (Pour davantage d’information, voir On sort, guide des bars et restaurants modernistes). Juste devant ce pub, nous pénétrons dans la plaça Reial, l’un des lieux les plus fréquentés de la ville, qui offre un nombre non négligeable de brasseries et de locaux nocturnes. La place, premier projet important de rénovation urbaine de la Barcelone du XIXe siècle, occupe le terrain sur lequel s’élevait l’ancien couvent des Caputxins de Santa Madrona, détruit au milieu du XIXe. La conception de cet espace urbain, avec ses arcades latérales caractéristiques, est l’œuvre de l’architecte et urbaniste Francesc Daniel Molina, qui s’inspira de l’urbanisme français de l’époque napoléonienne et la conçut comme une place résidentielle constituée de bâtiments de deux étages avec des combles construits sur de hautes arcades. Juste au centre de la place se trouve la fontaine des Tres Gràcies (Les Trois Grâces) et, de chaque côté de celle-ci, deux complexes
FANALS (LAMPADAIRES. Plaça Reial, s/n) de six lampes que le jeune Antoni Gaudí conçut en 1878.
Les deux lampadaires sont rehaussés par les attributs du dieu Hermès, patron divin des commerçants : un caducée -deux serpents enroulés autour d’une pique- et un casque ailé. La plaça Reial, à l’instar d’un bon nombre d’autres lieux du noyau historique de Barcelone, s’est développée sur des terrains auparavant occupés par des couvents ou des églises qui furent confisqués et vendus par l’État à des propriétaires privés. Ces mesures, promulguées en 1837 et connues sous le nom de desamortització de Mendizábal, permirent la vente aux enchères de 80 % des terrains que l’Église possédait à l’intérieur des murailles de Barcelone. La desamortització transforma radicalement le paysage urbain de Barcelone ; cette transformation fut rapide, profonde et durable. Les exemples ne manquent pas. Le marché de la Boqueria, en bordure de la Rambla, occupe le lieu sur lequel furent édifiés successivement le couvent de Santa Maria de Jerusalem (XIVe siècle) et le couvent de Sant Josep (XVIe siècle). Le couvent gothique de Santa Caterina, incendié en 1835 et détruit deux années plus tard, prêta son terrain et son nom à un marché. Le Liceu lui-même est situé sur le lieu où, en d’autres temps, existait un couvent de moines trinitaires aux pieds nus. De même que l’autre grand centre de la musique de Barcelone, le Palau de la Música Catalana fut construit sur les ruines du couvent de Sant Francesc de Paula.
Là, on pourra faire une petite déviation jusqu’au numéro 8 du carrer dels Escudellers, afin de voir la brasserie Grill Room, ancien café de style modernista (Pour davantage d’information, voir On sort, guide des bars et restaurants modernistes).
Nous quittons la place Reial et parvenons à la Rambla, la célèbre artère populaire de Barcelone. À l’époque de la splendeur maximum du mouvement modernista, le terrain constructible dans la Barcelone ancienne n’était pas excessivement important. C’est ce qui explique que, à part quelques boutiques ayant une touche de ce style, le Modernisme ait été une exception dans cette partie de la ville. Une exception qui a cependant quelques œuvres maîtresses telles que le PALAU GÜELL (PALAIS GÜELL), la première œuvre (1885-1889) qu’Antoni Gaudí, l’architecte le plus singulier du Modernisme, devait offrir à la ville de Barcelone et qui a été déclaré bien du patrimoine mondial par l’Unesco. Gaudí n’avait que trente-quatre ans quand il reçut la commande de construction de la résidence privée de la famille Güell. Et, curieusement, ce ne fut pas dans l’Eixample, qui était déjà en pleine expansion, mais dans le quartier du Raval, une zone qui, à la fin du XIXe siècle, était déjà très dégradée et dans laquelle abondaient la prostitution et les salles de rendez-vous. Peut-être n’était-il pas très logique qu’Eusebi Güell, père de sept enfants, s’en fut vivre dans cette rue. Il avait cependant un bon motif pour le fair.
La façade du Palau Güell, aux lignes vénitiennes suggestives, est construite avec une pierre d’aspect sévère. On y remarquera particulièrement le dessin de fer forgé qui couvre les tympans des deux arcs paraboliques de l’entrée et de la sortie, et qui forme le majestueux écu catalan aux quatre barres, conçu comme une petite colonne, qui préside la façade. La première pièce du palais est le vestibule, de vingt mètres de hauteur, qui donne à l’ensemble une sensation de transparence et articule les différents espaces dans lesquels se divise cette magnifique première œuvre de Gaudí. L’ensemble du bâtiment est organisé autour de ce vestibule central. Un escalier noble conduit à l’authentique joyau du Palau Güell : un surprenant, mystérieux et tellurique salon central, de sept étages de hauteur, couronné par une coupole parabolique en forme de cône. La coupole, percée d’une série de petites ouvertures en forme de cercle qui filtrent une lumière indirecte ténue, donne au salon une curieuse apparence de planétarium sous la lumière du jour, pour certains, et de salle centrale d’un hammam oriental, pour d’autres.
Le toit-terrasse est orné des vingt cheminées imaginées par Gaudí et restaurées entre 1988 et 1992 par un groupe d’artistes qui a reconstruit les huit d’entre elles les plus endommagées avec une fidélité absolue au travail original du maître. Dans l’une de ces nouvelles cheminées, avec un peu de patience, on pourra découvrir un Cobi, la mascotte des Jeux olympiques de Barcelone de 1992, au milieu du trencadís (revêtement fait de fragments irréguliers de verre et de faïence). Les cheminées gaudiennes, toutes uniques et différentes comme s’il s’agissait des diverses ébauches d’un modèle idéalisé, rappellent avec un peu d’imagination un groupe d’arbres, et elles représentent probablement l’une des premières esquisses du projet que Gaudí fera culminer des années plus tard sur le toit-terrasse de la Pedrera. Dans cette construction, par exemple, Gaudí utilisa pour la première fois le trencadís. Il s’agissait là d’une technique d’origine arabe que l’architecte de Reus et le Modernisme adoptèrent par la suite comme l’une de leurs principales formes d’expression. Si l’on prête attention à chacune des cheminées, on finira par découvrir dans l’une d’entre elles, probablement la dernière construite par Gaudí et entièrement de couleur blanche, le petit sceau vert d’un fabricant de céramique de Limoges. On raconte qu’Eusebi Güell avait une fantastique vaisselle de Limoges dont il était fatigué et qu’il donna à l’architecte afin que celui-ci l’utilise dans le revêtement de la dernière des cheminées du palais.
À l’autre extrémité du palais, au sous-sol, se trouvent les écuries, aux voûtes très surbaissées appuyées sur de simples colonnes fongiformes, architecture spectaculaire conçue pour accueillir les stalles des chevaux ainsi que les logements des palefreniers du palais. Les colonnes et leurs chapiteaux de brique constituent l’un des paysages les plus énigmatiques, suggestifs et célèbres de l’architecture gaudienne. La famille Güell l’habita jusqu’à la Guerre civile, époque à laquelle le palais fut confisqué par la CNT-FAI qui le transforma en caserne et en prison. Les Güell ne revinrent jamais. L’abandon et la dégradation généralisée de cette zone du Raval entraînèrent les héritiers du comte Güell à céder le palais, en 1945, à son actuelle propriétaire, la Diputació de Barcelona.

Antoni Gaudí i Cornet
1852 - 1926
Antoni Gaudí i Cornet est né en 1852 à Reus, à l’est de Tarragone, au sein d’une famille d’artisans de Riudoms, qui se consacraient traditionnellement à la fabrication de chaudrons et autres objets de cuivre. Benjamin de cinq enfants, il est parti à Barcelone en 1873 pour entreprendre des études d’architecture, qu’il a terminées quatre ans plus tard. On dit que le directeur de l’École d’Architecture, Elies Rogent, en lui délivrant le diplôme, aurait fait le commentaire suivant :
«Qui sait si nous venons de décerner ce diplôme à un fou ou à un génie ; seul le temps pourra le dire».
Sa première commande professionnelle a été la conception des nouveaux bâtiments de la coopérative textile de Mataró (1878), pour lesquels l’architecte a eu l’idée de singuliers arcs caténaires de bois ainsi que d’une gigantesque abeille de bronze (symbole de la coopérative). Cette même année, Gaudí a conçu une vitrine de verre ornée de fer forgé, d’acajou ainsi que de marqueterie, afin qu’un fabricant de gants catalan, Esteban Cornellá, puisse exposer ses produits à l’Exposition universelle de Paris. La vitrine a séduit Eusebi Güell, industriel, aristocrate et politicien en plein essor, qui a décidé de devenir le mécène de ce jeune architecte et dessinateur. Le premier travail de Gaudí pour Güell a été la conception du mobilier du panthéon dont le marquis de Comillas, beau-père tout-puissant de Güell, disposait dans les environs de Santander. Cette commande a été suivie d’une autre, une pergola décorée avec des ballons et des centaines de pièces de verre. À partir de cette époque, sa carrière et son œuvre -qui avec les années est devenue l’un des symboles les plus célèbres de Barcelone- ont été intimement liées à la famille Güell.
En 1883, il a reçu la commande de la construction de la Sagrada Família, la grande œuvre de sa vie, à laquelle il a consacré tous les efforts de ses dernières années. Cette concentration graduelle de son temps dans le grand temple expiatoire a été parallèle à la consolidation de sa ferveur envers la religion catholique qui, chez le jeune Gaudí, n’avait guère été notoire. Dans sa maturité, le grand architecte catalan était connu pour être un homme frugal et solitaire, qui rassemblait toute son énergie pour sa profession, grâce à laquelle il exprimait ses deux grandes passions : le christianisme et le catalanisme. Sa défense obstinée de l’identité catalane l’a même entraîné à être détenu par la police le 11 septembre 1924, jour de la fête nationale catalane, pour avoir refusé d’obéir à un officier qui lui intimait l’ordre de parler en espagnol.
Le 7 juin 1926, Gaudí a été renversé par un tram sur la Gran Via. Le personnel de l’hôpital, qui a tenté sans succès durant trois jours de lui sauver la vie, l’avait confondu avec un mendiant du fait de l’humilité de ses vêtements.
Pas très loin du Palau Güell se trouve le (C/ Nou de la Rambla, 34). Il s’agit d’un bar modernista fondé en 1910 et qui continue à fonctionner en tant que tel depuis presque un siècle (Pour davantage d’information, voir On sort, guide des bars et restaurants modernistes).
La Route du Modernisme de Barcelone se poursuit en remontant la Rambla en direction de la plaça de Catalunya. Presque en face des arcades qui donnent accès à la plaça Reial se trouve l’HOTEL ORIENTE (HÔTEL ORIENT. Rambla, 45-47) construit en 1842 quand l’ancien collège religieux de Sant Bonaventura fut transformé en une auberge prospère. L’hôtel, dont la façade fut remodelée en 1881, conserve dans son salon de fêtes la magnifique structure de l’ancien cloître du XVIIe siècle aux piliers carrés ainsi que l’ancien réfectoire rectangulaire voûté. Des hôtes de renom ont dormi dans ses chambres, parmi lesquels l’écrivain Hans Christian Andersen, l’acteur américain Errol Flynn, le torero Manolete ou la soprano Maria Callas. On remarquera encore, dans sa discrète façade, les sculptures de deux anges qui ornent l’arc de l’entrée principale.
En remontant la Rambla, on trouve à gauche l’un des bâtiments parmi les plus emblématiques de la ville, bien qu’il ne s’agisse pas d’une construction modernista : le GRAN TEATRE DEL LICEU (GRAND THÉÂTRE DU LYCÉE. Rambla, 51-65). L’histoire de ce haut-lieu de Barcelone est directement marquée par les incendies. Le bâtiment original, construit par Miquel Garriga en 1847 sur le terrain de l’ancien couvent des Trinitaris, brûla en 1861. Il fut reconstruit par Josep Oriol Mestres avec une simplicité extérieure seulement rompue par sa façade caractéristique au corps central percé de trois grandes fenêtres, qui cachait l’un des théâtres lyriques les plus fastueux du monde. L’incendie du théâtre de 1994 obligea à effectuer une nouvelle reconstruction, réalisée par l’architecte Ignasi de Solà-Morales, qui recréa le fastueux style traditionnel du bâtiment, en récupérant les salons aux peintures pompéiennes en trompe-l’œil. À ses origines comme théâtre lyrique, le Liceu dut entrer en compétition avec le TEATRE PRINCIPAL (Théâtre Principal, que nous avons laissé derrière nous. Rambla, 27), un local pouvant accueillir deux mille personnes qui avait déjà une longue tradition dans la ville. Le Liceu, dont le rideau s’ouvrit pour la première fois sur Anne Boleyn de Donizetti, gagna la partie et devint la cathédrale du bon goût ainsi que la vitrine préférée des classes les plus puissantes de Barcelone qui vinrent y exhiber leurs richesses. Malgré la sobriété de son architecture, on remarquera tout particulièrement la marquise de fer forgé qui préside à l’entrée principale ainsi que les panneaux de sgraffites qui rendent hommage à Calderón de la Barca, à Mozart, à Rossini et à Moratín. Le bâtiment du Liceu abrite, presque au coin de la Rambla et du carrer de Sant Pau, un authentique et élitiste sanctuaire, le Cercle del Liceu, organisme privé, aristocratique et traditionnel, ancien club du plus pur style anglais, qui « cache » dans ses salons intérieurs de célèbres œuvres des peintres modernistes Ramon Casas et Alexandre de Riquer, ainsi que des verrières ornées de thèmes wagnériens d’Oleguer Junyent.
De l’autre côté de la rue, l’itinéraire passe devant un commerce de longue tradition qui conserve une décoration modernista sur la façade, l’ancienne CAMISERIA BONET (CHEMISERIE BONET. Rambla, 72). Ce commerce, fondé en 1890, a changé de propriétaire et d’activité en 2002 ; aujourd’hui, il se consacre à la vente d’objets de souvenir de Barcelone, mais il a conservé son aspect extérieur. Dans le bâtiment contigu, se trouve le
CAFÈ DE L’ÒPERA (CAFÉ DE L’OPÉRA. Rambla, 74) ouvert en 1929 sur les lieux mêmes de la très ancienne chocolaterie La Mallorquina. L’intérieur est bien conservé, on y remarquera les chaises Thonet ainsi que les miroirs du XIXe siècle ornés de figures féminines évoquant les personnages de différents opéras (Pour davantage d’information, voir On sort, guide des bars et restaurants modernistes). -› page 44
Après le Liceu, l’itinéraire abandonne momentanément la Rambla pour s’aventurer, sur la gauche, dans le carrer de Sant Pau. L’histoire hôtelière de Barcelone a dans l’HOTEL ESPAÑA (HÔTEL ESPAÑA. C/ Sant Pau, 9-11) l’un de ses établissements les plus traditionnels. L’intérêt architectural de cet hôtel, qui en son temps de splendeur hébergea le héros national philippin José Rizal, réside dans ses salons, décorés en 1902-1903 par l’un des pères du Modernisme, Lluís Domènech i Montaner. Pour l’Hotel España, Domènech i Montaner disposa de la collaboration de deux grands maîtres des arts plastiques de l’époque, le sculpteur Eusebi Arnau et le peintre Ramon Casas. Eusebi Arnau est l’auteur de la splendide cheminée d’albâtre de l’une des salles à manger, visible depuis la rue, alors que Ramon Casas se responsabilisa des sgraffites marins de la salle à manger intérieure, dans laquelle on remarquera aussi une claire-voie à caissons laissant filtrer une lumière très diffuse qui rehausse l’effet des sgraffites de Casas. Domènech i Montaner arrondit l’ensemble avec deux ingénieux éléments de revêtement de bois. L’un d’entre eux, de conception très soignée, est décoré de médaillons de céramique bleutée qui représentent les provinces espagnoles, alors que le second, de type romain, est centré sur des thèmes floraux (Pour davantage d’information, voir On sort, guide des bars et restaurants modernistes). À seulement quelques mètres de l’Hôtel España se trouve un autre établissement hôtelier aux réminiscences modernistes,
l’HOTEL PENINSULAR (HÔTEL PENINSULAR. C/ Sant Pau, 36). Le principal intérêt de ce bâtiment, ancien collège de religieuses, réside dans son patio garni de galeries ainsi que dans la claire-voie qui rehausse les couleurs vert et crème de ses murs.
De retour sur la Rambla, on se trouve au Pla de la Boqueria, présidé par la MOSAIC CERÀMIC DE JOAN MIRÓ (MOSAÏQUE CERAMIQUE DE JOAN MIRO) que la municipalité aménagea en 1976 et qui est devenue, avec les années, l’un des signes d’identité les plus emblématiques de cette populaire artère barcelonaise. À droite, se trouve la CASA BRUNO CUADROS (MAISON BRUNO CUADROS. Rambla, 82), un bâtiment pré-modernista très intéressant de Josep Vilaseca -auteur de l’arc de triomphe de l’Exposition universelle de 1888-. Cette ancienne maison, connue populairement sous le nom de Casa dels Paraigües (Maison aux parapluies), fut remodelée en 1883. Visiblement, elle intrigue par ses éléments orientaux, tels que la décoration de sa façade avec des sgraffites et des vitraux, la galerie un rien égyptienne du premier étage ou le dragon chinois qui préside au coin de l’immeuble. L’ancienne boutique du bâtiment, aujourd’hui occupée par une banque, jouit d’éléments ornementaux d’inspiration japonaise réalisés en bois, en verre et en fer forgé.

La Rambla
La Rambla était à l’origine une voie large et inégale qui serpentait d’un extrême à l’autre de la ville, en suivant la muraille médiévale que Jacques Ier avait fait construire au XIIIe siècle, soit une centaine d’années avant qu’une nouvelle enceinte de hauts murs n’entoure le quartier du Raval et ôte sa fonction défensive théorique à la muraille de la Rambla. Toutefois, les différentes portes qui ont été ouvertes -Santa Anna, Portaferrissa, Boqueria, Trentaclaus et Framenors- n’ont pas disparu et elles ont favorisé l’installation de quelques constructions, telles qu’une fonderie de canons, ou de marchés à l’air libre. “Rambla”, en arabe, est un cours d’eau, et c’est précisément ce que c’était : une rivière qui avait pour nom el Cagalell, et qui était devenue une sorte de tout-à-l’égout, plein d’ordures et d’excréments. De l’autre côté de cette fosse, dès le XVIe siècle se sont installés les premiers centres religieux -couvent de Sant Josep, 1586-, d’enseignement -Estudis Generals, 1536- et ludiques -théâtre de la Santa Creu, 1597-. La Rambla du XVIIIe siècle présentait, par conséquent, une muraille d’un côté et des couvents et églises de l’autre, du côté du Raval. Ce n’est qu’à la fin du XVIIIe, quand les ingénieurs militaires avec à leur tête Juan M. Cermeño ont entamé l’urbanisation, que la Rambla a pu définir son tracé actuel.
La Rambla est une seule avenue, mais elle reçoit de nombreux noms tout au long de son parcours : Rambla de Santa Mònica, dels Caputxins, de Sant Josep, dels Estudis et de Canaletes. Ces dénominations ne sont absolu-ment pas gratuites, elles correspondent en effet aux couvents, églises ou autres édifices devant lesquels passait l’avenue à mesure que, aplanie, elle commençait à prendre forme. En 1768, on a commencé la destruction de la muraille et la construction de certains
des édifices les plus emblématiques de nos jours, comme le Palau de la Virreina, le Palau Moja, devant lesquels passe la Route du Modernisme, ou la Casa March de Reus -œuvre de Joan Soler i Faneca, 1775- que l’on trouve plus bas, au numéro 8. Le dernier grand moment de la formation de la Rambla est arrivé au milieu du XIXe siècle avec les processus libéraux de sécularisation des biens de l’Église, qui ont entraîné la disparition de la majorité des couvents, convertis en nouvelles rues, comme le carrer Ferran, en espaces publics, comme la plaça Reial, en marchés, comme celui de la Boqueria, ou en édifices qui, avec le temps, sont à leur tour devenus emblématiques, comme le Liceu. La Rambla est actuellement la meilleure vitrine de la ville, de son histoire et de la vie de ses habitants. Comme l’a indiqué l’écrivain Josep Pla dans l’une de ses œuvres : « La Rambla est une merveille. C’est une des rares artères de Barcelone dans laquelle je me sens pleinement bien. Il y a toujours suffisamment de gens pour rencontrer quelqu’un de connaissance, et il y en a toujours suffisamment aussi pour passer inaperçu, si nécessaire ».
La sort d’aquesta botiga va ser compartida per altres. L’any 1962, l’arquitecte David John Mackay va xifrar en 800 les botigues modernistes que hi havia a la ciutat de Barcelona. Amb el pas del temps i l’avanç de les excavadores, aquest nombre s’ha reduït actualment a menys de mig centenar. Cada dia són menys nombroses les supervivents d’aquest Modernisme que alguns han qualificat injustament de “menor”, només perquè les seves pedres no formen part de grans obres arquitectòniques. Algunes d’aquestes botigues es conserven elegants i presumides, d’altres sobreviuen disperses per la ciutat; algunes estan en bones condicions, i d’altres, en plena agonia, però totes tenen una unitat artística que permet reconstruir, entre estucats, mosaics, vidrieres i artesanies de caoba, com van ser aquells anys que van transcórrer entre l’Exposició Universal de 1888 i la segona dècada del segle XX. Eren els anys en què la burgesia barcelonina viatjava a París i creia fermament que Catalunya era Europa. Va ser una època en què el Modernisme es va convertir en un art quotidià que aconseguia que els articles vulgars esdevinguessin art. L’eufòria del canvi de segle, la voluntat renovadora, es va traduir en una utilització social de l’art, en una arquitectura anònimai popular que dignificava qualsevol obra. Va ser així com els forns de pa, les pastisseries, les farmàcies, les botigues de teixits i les perfumeries van ser tractades amb el mateix respecte decoratiu que les grans cases de la burgesia. Juntament amb la Casa Batlló, la Pedrera, el Park Güell i la Sagrada Família, es van multiplicar els petits establiments que lluïen amb orgull el segell de la nova moda modernista. El 1909, la revista L’Esquella de la Torratxa resumia en una sola frase la febre modernista que convulsava la ciutat: “Barcelona està cridada a ser l’Atenes del Modernisme”. Una selecció dels millors exemples de botigues modernistes encara existents la trobareu en aquesta guia al capítol Guapos per sempre.
El millor exemple d’aquesta febre modernista que va experimentar Barcelona són dos edificis gairebé contigus de la Rambla. La (Rambla, 77), obra d’Enric Sagnier i Villavecchia (1911), va allotjar una farmàcia i el seu laboratori fins a 1974 (actualment hi ha un bar de tapes basc).
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La Route du Modernisme de Barcelone est un itinéraire qui traverse la Barcelone de Gaudí, de Domènech i Montaner et de Puig i Cadafalch, qui ont fait de Barcelone, conjointement avec d’autres architectes, la capitale mondiale du Modernisme. Grâce à cet itinéraire, vous pourrez découvrir à fond des maisons surprenantes, d’impressionnants palais, le temple symbole de la ville ainsi qu’un immense hôpital, mais aussi des œuvres plus populaires et plus quotidiennes telles que des pharmacies, des commerces, des boutiques, des lampadaires ou des bancs, œuvres modernistes qui démontrent que le Modernisme s’est enraciné avec force à Barcelone et qu’il représente encore aujourd’hui un art vivant et vécu.
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